Quand le sort s'acharne

Aujourd'hui, Hermione a besoin de s'acheter une nouvelle paire de chaussures. Elle se rend donc dans la magnifique zone commerciale se trouvant à la périphérie de Baliol. Certains s'étonneront encore de la disparition des commerces en centre-ville ! Munie d'un masque et de son précieux gel hydroalcoolique, elle pénètre dans le magasin : 

- Bonjour Madame, je ne vous propose pas le gel, je vois que vous en avez. Et je sais que les personnes âgées sont généralement prudentes. C'est bien !

Si Hermione en perd l'usage de la parole, elle oublie surtout son désir d'achat. Se faire traiter de vieille à un âge encore loin d'être canonique, ça plombe résolument le moral ! C'est donc bien pitoyablement qu'elle ressort du magasin traînant derrière un elle un caddie désespérément vide ! 

Parvenue à un passage pour piétons, un élégant jeune homme s'approche d'elle et lui dit :

- Votre caddie semble bien lourd, Madame ! Voulez-vous que je vous aide à traverser la rue ?

- Ne prenez pas cette peine, il est vide, rétorque-t-elle. Mais merci quand même.

À ce moment précis, Hermione retrouve sa vigueur légendaire pour prendre ses jambes à son cou. Elle est pressée de rentrer chez elle pour ne plus voir personne. Pour ce faire, elle décide de passer par un parc qui a la réputation d'être mal fréquenté. Dans un monde qui juge tout et n'admire plus grand-chose, même les jardins peuvent avoir une réputation ! Entre nous, celui qu'emprunte mon amie souffre plus exactement d'un sérieux manque d'entretien. En effet, certains de ses recoins bénéficient d'une gestion différenciée. En termes clairs, cela veut surtout dire qu'ils ne sont plus entretenus. Et pour justifier cela, on dit que c'est pour le bien des petites bébêtes qui aiment venir s'y détendre.

Enfin bref, madame Montbaillard a la mauvaise idée de le traverser, ce parc. Deux garçons sont assis sur un banc et fument un drôle de pétard. Une odeur indéfinissable flotte dans l'air. Hermione n'a jamais rien respiré de tel.

- Souhaitez-vous goûter ? propose l'un des deux gars.

- Je ne voudrais pas vous priver, réplique-t-elle, en feignant un sourire.

Sept heures sonnent au clocher baliolois lorsque mon amie rentre chez elle. Elle a les traits tirés, le regard fatigué. C'est un peu normal, me direz-vous, après ces différents coups au moral ! Elle se déshabille avec hâte, car elle compte bien aller se coucher. 

- Trop, c'est trop, me déclare-t-elle. Ce matin, j'aurais mieux fait de ne pas me lever. Il y a des moments comme ça dans la vie où l'on se passerait volontiers de la « sollicitude » des gens. Parfois, on pourrait même croire que la terre entière s'est liguée contre vous. Je ne sucre pas encore les fraises pourtant !

Quant à moi, j'espère seulement qu'elle n'a point goûté au fameux joint et que je ne la trouverai pas, demain matin, en train de fumer la moquette ! On n'est jamais sûr de rien avec madame Montbaillard, surtout lorsqu'elle est en pétard !